Rapports de recherche - 2004

Conditions de travail, santé et aspirations à la retraite. Actes du séminaire. Vieillissement et travail (année 2003)

#18 - décembre 2004 - Creapt-EPHE

Le Centre d’études de l’emploi diffuse, dans la collection de ses rapports de recherche, la transcription du séminaire organisé annuellement par le Créapt et le laboratoire d’ergonomie de l’EPHE sur le thème général du vieillissement au travail. Ce séminaire rassemble une cinquantaine de participants (chercheurs, enseignants, étudiants, et praticiens) pendant trois journées. Ce rapport reproduit les exposés et discussions de la session de mai 2003 consacrée au thème : « Conditions de travail, santé et aspirations à la retraite ». L’objectif de ces échanges était d’enrichir les réflexions sur les pratiques concrètes de cessation d’activité et sur les dispositions qui sous-tendent ces pratiques, de la part des salariés et des employeurs, en privilégiant les enjeux de santé au travail. Les quatre premières interventions présentées (y compris l’exposé introductif) adoptent une approche large de cette question, avec un appel fréquent aux données quantitatives. Les quatre autres (avant la discussion générale) s’intéressent au contraire à des métiers particuliers, voire à des situations individuelles auxquelles certains professionnels sont confrontés dans leur pratique.

Annie Jolivet, en ouverture du séminaire, examine en quoi les dispositifs institutionnels qui encadrent les sorties d’activité prennent en compte, de façon plus ou moins directe, la pénibilité du travail et la santé des salariés. Cet examen l’amène à préciser des facteurs d’inégalité inhérents à ces dispositifs ou à leur usage, et à s’interroger de ce point de vue sur les conséquences potentielles des réformes en cours.

L’exposé d’Anne-Françoise Molinié et celui de Francis Derriennic, fondés sur des enquêtes statistiques, donnent une description plus précise des intentions ou des pratiques de départ, dans leurs relations avec le travail et la santé. Anne-Françoise Molinié reprend, d’une part, des résultats de l’enquête « Bonheur et Travail » pour repérer des liens entre le rapport au travail et « l’image » de la retraite chez les salariés ; elle présente, d’autre part, une analyse de certaines réponses à l’enquête Visat, concernant le sentiment chez les salariés d’être (ou non) « capable d’occuper leur emploi jusqu’à la retraite ». Francis Derriennic, lui, étudie directement les comportements de sortie d’activité chez des salariés de l’échantillon Estev : il montre en quoi leurs conditions de travail ou leur santé en 1990 avaient pu jouer un rôle dans leur départ, au chômage ou en retraite, entre 1990 et 1995.

Thomas Barnay reprend et étaye les constats de disparités d’état de santé des salariés âgés, et pose en termes successivement épistémologiques, juridiques et économiques la question de la légitimité des politiques discriminantes en ce domaine.

Les exposés de Serge Volkoff, de Arnaud Parienty, et de Valérie Pueyo et Michel Millanvoye relèvent plutôt de la catégorie des études de cas. Serge Volkoff montre comment on a cherché à évaluer la pénibilité à long terme dans la profession d’éboueur. Il illustre en particulier l’apport et les difficultés d’une interrogation rétrospective auprès d’anciens salariés de cette profession. Arnaud Parienty propose une relecture des résultats d’enquêtes et études syndicales en milieu enseignant, pour préciser les attitudes des professeurs, en milieu ou fin de carrière, en matière de rapport au travail et de projets de départ. Valérie Pueyo et Michel Millanvoye rendent compte d’une étude approfondie de l’activité de travail sur un plancher de coulée dans la sidérurgie, auprès de fondeurs jeunes et anciens. Ils indiquent comment s’articulent (ou s’entrechoquent) des objectifs de préservation de la santé, de maîtrise du risque industriel, de gestion flexible des effectifs et de transmission des savoir-faire entre générations, et comment cette préoccupation éclaire plusieurs enjeux d’avenir, par anticipation sur le départ des anciens.

L’exposé de Fabienne Bardot est de nature encore différente. Elle a recueilli et regroupé un ensemble de monographies individuelles, issues d’entretiens de médecins du travail avec des salariés de plus de 50 ans. Elle souligne les traits communs à plusieurs de ces histoires personnelles, mais en même temps la spécificité de chacune. Elle indique aussi en quoi certaines de ces situations posent aux médecins du travail des problèmes délicats à gérer, spécialement depuis les évolutions récentes du contexte institutionnel.   Pour leur part, Isabelle Rogez (ergonome au sein d’une Association régionale pour l’amélioration des conditions de travail-Aract) et Eléonore Marbot (enseignante chercheuse en sciences de la gestion, dont les recherches portent en particulier sur les motivations des salariés en fin de vie active) avaient en charge un rôle de « discutant », pour introduire le débat général qui a fait l’objet de la dernière demi-journée du séminaire et du dernier chapitre de ce rapport.

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Les associations de musiques actuelles, partenaires du programme Nouveaux services-Emploi jeunes. Contribution à un état des lieux

#17 - octobre 2004 - Marie-Christine Bureau, Bernard Gomel, Nicolas Schmidt

L’objet du rapport est de montrer, à partir de treize monographies réalisées en complément d’un recueil de données statistiques, comment le programme « Nouveaux services-Emplois jeunes » (NSEJ) a pu contribuer à la structuration d’un secteur en émergence, celui des associations de « musiques actuelles ». La quasi-totalité des associations rencontrées ont au moins une dizaine d’années d’existence et revendiquent une origine militante. Nées sur la base du bénévolat, elles ont grandi, pour certaines, avec l’appui des vagues successives de contrats aidés. En ouvrant un horizon de cinq ans, le programme NSEJ met en présence deux générations : 
- la génération des fondateurs, bénévoles au départ, rarement artistes eux-mêmes, plutôt amateurs de musique et/ou évoluant dans le milieu culturel ; 
- la jeune génération, caractérisée par un niveau d’études plus élevé, mais pourvue aussi d’une expérience associative dans le milieu musical, même si celle-ci n’est pas qualifiée de militante. Or, ces deux générations semblent se retrouver dans une même démarche autour de la notion d’« action culturelle locale » : accueillir les artistes que l’on aime ; encourager la création et offrir un tremplin aux vocations locales ; poursuivre un travail éducatif ; créer des événements.

On peut néanmoins identifier des facteurs de différenciation interne au secteur : la prééminence d’un projet artistique versus l’ancrage dans la filiation de l’éducation populaire ; l’importance et le rôle du bénévolat dans la vie des associations. On peut ainsi distinguer plusieurs « modèles » économiques : 
- L’association « affinitaire » a été créée par un groupe d’amis liés par une passion et/ou un engagement commun. Le bénévolat est indispensable à son fonctionnement et à sa survie.
- L’association « équilibriste » conjugue bénévolat et salariat. Elle allie ressources propres et financements publics, ce qui la soumet à plusieurs registres d’évaluation : elle doit justifier à la fois de la valeur de son projet artistique (évaluation artistique), de sa capacité à accroître ses ressources propres (évaluation commerciale) et de son action auprès de certaines catégories de population (évaluation sociale).
- La « petite entreprise de service public » remplit une « mission de service public », reconnue dans le domaine de l’action culturelle, et bénéficie à ce titre de financements publics. Le directeur assume l’essentiel de la responsabilité. La volonté de professionnalisme prime sur la mobilisation du bénévolat et se manifeste aussi à travers un souci de référence aux conventions collectives.
- L’« entreprise alternative » se caractérise par la volonté de développer un milieu musical autonome, capable de soutenir la création, la production et la diffusion de groupes, sans concessions à une logique de rentabilité ; par le souci de proposer des prix accessibles au public tout en garantissant une juste rémunération aux artistes ; par un objectif d’autonomie à terme vis-à-vis des financements publics.

Dans les associations de musiques actuelles, le programme NSEJ a été utilisé pour rémunérer enfin la force de travail nécessaire à la consolidation et au développement du projet associatif. La nature des emplois créés confirme cet usage. On peut distinguer trois catégories de postes : (1) des postes liés à la gestion de petites structures culturelles (tâches d’administration, de communication, de relation avec les partenaires, d’animation et de coordination de réseaux). (2) des postes plus techniques, associant travail de régie ou d’assistance technique et tâches de relation aux artistes et/ou au public. (3) des postes tournés vers l’accueil, l’information du public, l’animation de centre de ressources, l’organisation de formations.

En 2003, les emplois-jeunes (EJ) représentent 42 % de l’effectif salarié total des structures concernées. Un peu plus des trois quarts d’entre eux ont un niveau de formation égal ou supérieur à « bac + 2 ». Si les postes de travail sont attractifs, les salaires restent particulièrement faibles, compte tenu du temps de travail effectif et des niveaux de qualification à l’embauche.

Entraîné par l’usage des politiques d’emploi successives dans un mouvement de professionnalisation, le secteur associatif des musiques actuelles se caractérise par une économie fragile. La pérennisation des emplois créés par le programme NSEJ et l’amélioration des conditions de rémunération ne se feront que secondairement par le développement de ressources marchandes. Cette nouvelle situation oblige les pouvoirs publics à repenser les contours de la politique culturelle aux différents niveaux du territoire, ainsi que les partenariats avec d’autres formes d’intervention publique.

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La stratégie européenne pour l'emploi : genèse, coordination communautaire et diversité nationale

#16 - octobre 2004 - Jean-Claude Barbier, avec la collaboration de Ndongo Samba Sylla

Le rapport réfléchit sur les façons de considérer les transformations associées à la mise en œuvre de la stratégie européenne pour l’emploi (SEE) depuis le sommet de Luxembourg. Il propose de mieux distinguer les processus et les mécanismes qui sont à l’œuvre et suggère que les méthodes qu’il convient d’employer pour chaque type de transformation varient. Cela donne l’occasion d’observer le fonctionnement de « l’arène bruxelloise » où se construit et se décide le discours socioéconomique de la SEE. À partir d’un entretien avec Mr Allan Larsson, ancien directeur général à la Commission et ancien ministre des Finances suédois, le rapport, qui s’appuie sur l’exemple de la Suède, montre que des arrangements nationaux redistributifs sont parfaitement compatibles avec une politique monétaire communautaire unifiée. Il réfléchit également sur l’articulation des politiques sociales et économiques (niveau communautaire, niveau national). Le rapport étudie enfin l’émergence de la notion de « qualité de l’emploi » dans les forums communautaires et la façon dont cette notion peut se comparer avec d’autres, comme celle de « travail décent » proposée par le Bureau international du Travail (BIT). 

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Compétition généralisée, déclassement et conversions politiques. Les effets différentiels de la crise dans la sidérurgie et dans la haute technologie

#15 - septembre 2004 - Gabrielle Balazs, Jean-Pierre Faguer et Pierre Rimbert

À vingt-cinq ans d’intervalle, ouvriers du fer et techniciens de l’électronique ont subi des restructurations industrielles qui ont aussi déstructuré leur espace social. Déclassés, nombre d’entre eux ont vu décroître ou s’annuler le taux de conversion des espèces de capitaux spécifiques qu’ils détenaient. En révisant à la baisse les chances objectives de réussite, les transformations survenues ruinent les investissements scolaires et professionnels initiaux, fragilisent des positions déjà souvent situées en deçà des espérances, anéantissent les profits sociaux liés aux trajectoires ascendantes et exacerbent la concurrence entre fractions de classes. Il en résulte une multiplication de positions socialement « intenables » à la fois par la difficulté de s’y maintenir sans déchoir et par la faible probabilité d’en sortir « par le haut ». On fait l’hypothèse qu’une station prolongée dans ces positions de « porte-à-faux » social influe sur les catégories politiques de ceux qui s’y trouvent relégués et, dans le contexte politique et économique actuel, contribue à installer les conditions de possibilité d’un intérêt pour certains thèmes véhiculés par l’extrême droite. 

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Les seniors et les transferts de compétences dans les TPE et PME d'Auvergne : un état des lieux

#14 - septembre 2004 - Bruno Courault, Emilie Bourlier, Philippe Trouvé

La région Auvergne a initié en 2003 un programme d’étude sur l’emploi des travailleurs âgés dans les PME de la région. Ce programme s’inscrit dans le cadre des opérations Equal (fonds européen destiné à la formation), et sa gestion a été confiée à l’Opcareg Auvergne, en partenariat avec les organismes consulaires de la région, les quatre chambres de commerce et chambres de métiers départementales et leurs structures régionales.

L’Opcareg a sollicité le concours de deux chercheurs, Bruno Courault (CEE) et Philippe Trouvé (Cra-Céreq, ESC de Clermont-Ferrand), qu’Emilie Bourlier (Cerdi, Université d’Auvergne à Clermont-Ferrand) a rejoints. Mission leur a été confiée de piloter une enquête auprès de 250 PME de la région.

La question des transferts était centrale aux yeux des concepteurs du projet, leur intuition de départ étant la suivante : pensant que les entreprises ne gardaient pas leurs travailleurs au-delà d’un certain âge, ils voulaient les convaincre de mieux utiliser les compétences de ces derniers ; l’objectif des phases ultérieures du programme étant de concevoir les actions de formation comme autant de moyens de favoriser et rendre ces transferts possibles.

L’étude, pour identifier tout ce qui faisait obstacle à ces transferts, s’est fixé deux objectifs :
(1) caractériser les situations d’emploi des travailleurs âgés dans les PME pour tenter de comprendre s’il y avait des facteurs explicatifs de leur maintien ou de leur éviction dans l’emploi,
(2) cerner les écarts entre les potentialités qu’offrent les travailleurs âgés et la façon dont les entreprises pourraient les mobiliser davantage qu’elles ne le font en réalité. L’enquête, qui a porté finalement sur 238 unités, a donné lieu à une seconde enquête auprès des salariés des PME, pour prendre la mesure de l’acceptation ou du refus par les salariés du vieillissement dans l’emploi, avec toutes les dimensions qui lui sont associées.

Après un premier chapitre qui expose le cadre de l’étude et présente les caractéristiques des populations de PME et de salariés étudiées, le chapitre 2 détaille les qualités et limites qui expliquent que, dans leur grande majorité, les entreprises sont attachées aux seniors et privilégient leur maintien dans l’emploi, une minorité adoptant une attitude inverse.

Le chapitre 3 passe en revue les métiers qu’exercent les seniors dans les PME et les TPE d’Auvergne. L’examen de cette variable, très liée à la précédente, fait apparaître que le plus souvent, pour ne pas dire toujours, la préférence pour le travailleur âgé s’explique par sa profession et le métier qu’il pratique. Dans les TPE, cette relation se trouve renforcée par les variables sociologiques de proximité (gestion paternaliste).

Le chapitre 4 explore le rôle des savoirs et des compétences acquises dans le travail comme facteur explicatif de la permanence des travailleurs âgés dans l’emploi. Les savoirs sont appréhendés dans leur dimension dynamique, depuis la formation initiale jusqu’à la situation d’excellence professionnelle, grâce à l’ensemble des formations mobilisées tout au long du parcours. Il est toutefois difficile de démêler ce qui émane du travailleur lui-même, et ce qui résulte de la façon dont les entreprises, dans lesquelles il a exercé son métier, ont su valoriser ces acquis professionnels en lui prodiguant force formation professionnelle.

Le chapitre 5 souligne la façon dont les TPE et les PME valorisent les atouts que constituent les compétences des seniors. Les monographies retenues, qui éclairent les démarches et les attitudes des entreprises vis-à-vis des seniors, ont permis d’identifier trois cas types : ceux où les seniors ne jouent aucun rôle ; ceux, très riches d’occurrences, dans lesquels ils apparaissent comme un des moteurs de la dynamique des PME, et ceux où ils sont au cœur du processus de transmission (majoritairement des TPE artisanales).

Le dernier chapitre s’interroge : la question du maintien dans l’emploi des seniors ne cache-t-elle pas d’autres questions relatives à l’avenir du tissu régional ? Les enseignements qui se dégagent de l’étude seraient autant de façons de lire les difficultés des entreprises, dans un contexte socio-productif déclinant, confrontées à des pénuries de main d’œuvre structurelles et à des dirigeants et artisans également vieillissants.

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