Une jeunesse au guichet de l'emploi. Enquête sur le Contrat d'engagement jeune
10 juillet 2025
Ce rapport de recherche propose une analyse de la mise en œuvre du Contrat d’engagement jeune (CEJ) à partir d’une enquête qualitative. Ayant vu le jour le 1er mars 2022 et faisant suite à la Garantie jeunes, le CEJ constitue un dispositif d’accompagnement intensif auprès des jeunes qui vise à leur insertion socio-professionnelle. 590 000 contrats ont été signés entre mars 2022 et 2023. Pouvant s’étaler entre six mois et dix-huit mois, ce dispositif est mis en place aussi bien par les agences France Travail que par les missions locales, ainsi que – dans le cadre spécifique du sous-dispositif dit « Jeunes en rupture » – par des partenaires locaux des missions locales, en l’occurrence essentiellement des associations. Dans chacune de ces institutions faisant partie du « service public de l’emploi », les conseillères et conseillers doivent faire en sorte que les jeunes inscrits en CEJ effectuent entre 15 et 20 heures d’activité par semaine dans le cadre de leur projet d’insertion. En effet, le dispositif demande aux jeunes de s’investir dans leur projet socio-professionnel en contrepartie de l’attribution (sous conditions de ressources) d’une allocation.
Menée sur trois communes franciliennes, notre enquête de terrain nous a permis de collecter 71 entretiens avec diverses actrices et acteurs prenant part à la mise en œuvre du CEJ, soit des cadres de direction, des conseillères et conseillers, des jeunes. Nous avons également réalisé 19 journées d’observation auprès d’elles et eux. Ce rapport de recherche propose d’interroger la concrétisation de ce nouveau dispositif destiné aux jeunes « éloignés de l’emploi ». Tout un ensemble de questions suivent ce fil conducteur. Les institutions précitées travaillent-elles ensemble dans le cadre du CEJ ? Si oui, comment ? Est-ce qu’une labellisation commune de leur travail produit une homogénéisation de l’activité des conseillères et conseillers, ou bien chacun garde ses spécificités ? Que se joue-t-il dans le recrutement des jeunes qui se présentent au guichet du service public de l’emploi ? De quelles manières les conseillères et conseillers des trois institutions qui assurent la mise en œuvre du CEJ intègrent les jeunes ? Comment prend forme le « suivi intensif » à leur égard ?
Ce rapport de recherche montre que le ciblage des jeunes en situation de précarité dans le cadre du CEJ, élaboré « par le haut », soit par les décideurs publics à différentes échelles d’action publique (Europe, France), est retravaillé « par le bas », c’est-à-dire au travers des relations entre les conseillères ou conseillers et leurs destinataires, ainsi que façonné par les conditions matérielles dans lesquelles travaillent les premiers. En ce sens, cette recherche rend compte de la manière par laquelle les institutions construisent, à différents niveaux d’action publique et par des divisions du travail entre elles, la jeunesse à insérer socio-professionnellement. Elle analyse notamment, d’une part, l’entrée des jeunes dans le dispositif au travers de ces diverses entrées au guichet du service public de l’emploi et, d’autre part, le principe d’un accompagnement dit « intensif ».
10 juillet 2025
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