Thérèse Rebière

"Élection américaine", épisode 6 : « La crise sanitaire vient annuler toutes les mesures de Trump qui auraient pu avoir un effet positif"

6 novembre 2020

"Le meilleur de tous les temps." C'est ainsi que Donald Trump qualifiait son bilan économique fin 2019. Croissance en hausse, baisse historique du chômage et de la pauvreté depuis un demi-siècle... Depuis, la crise du Covid-19 a frappé le monde et les États-Unis de plein fouet. Selon Thérèse Rebière, maîtresse de conférences en économie au Conservatoire national des arts et métiers à Paris (CNAM), la gestion de la pandémie est ce qui va déterminer les résultats des élections. Entretien.

TV5MONDE : Pouvez-vous expliquer la façon dont a évolué la situation économique durant le mandat de Donald Trump ? Le président affirmait avoir hérité d’un pays en « mauvaise forme économique »… 

Thérèse Rebière : Lorsque l'on écoute Trump, on a le sentiment qu'il est le sauveur de l’économie américaine. Pourtant, si l’on reprend la situation économique des mandats d’Obama, les tendances à la hausse de la croissance étaient déjà là.

Il y a deux indicateurs clés : le produit intérieut brut (PIB) et le taux de chômage. Ils vont dans le même sens entre 2009 et 2016 : le PIB augmente de façon régulière et tendancielle, tandis que le taux de chômage baisse. Fin 2019, ce taux est encore descendu, à 3,5%, c’est-à-dire que le pays est dans une situation de quasi plein-emploi au niveau fédéral.
 

Évolution taux de chômage aux Etats-Unis depuis 2009 (source : ABC Bourse)

Il est difficile de détricoter ce qui dépend totalement de Trump. On aurait pu se poser la question à l’inverse et c’est d’ailleurs le discours des démocrates : la seule chose qu’il a faite est de réussir à ne pas laisser empirer la situation économique.


En 2016, Donald Tump avait annoncé de grands chantiers sous l’égide de l’"America First" (l'Amérique d'abord). Qu’a-t-il mis en place concrètement ?  

La caractéristique du mandat de Donald Trump est qu’il dit beaucoup de choses, notamment farfelues. Pourtant, si l’on regarde les annonces de son plan de campagne de 2016, beaucoup de choses ont été réalisées. Il dit beaucoup de choses, et fait beaucoup ce qu’il dit. 

Dans les mesures macroéconomiques d’abord : la plupart de ses grands chantiers ont été mis en œuvre, notamment la renégociation des traités internationaux, avec le « America first ». Trump estime qu’un échange n’est intéressant que s’il est "gagnant" pour les Etats-Unis.

Sur le climat ensuite, Donald Trump avait clamé son climato-scepticisme et annoncé le retrait des Etats Unis de l’accord de Paris. Il s’est exécuté. Il a aussi poussé de nombreuses politiques de dérégulation environnementale, tout en incitant les Etats à déréguler eux-mêmes. A une époque, il avait critiqué la Californie qui avait une réglementation environnement un peu plus stricte.

L’emploi, enfin. Trump a fait campagne sur les emplois en disant qu’il allait les rapatrier aux Etats-Unis, comme si l’emploi était le problème principal du pays, alors que ce n’était pas le cas. Comme on l’a évoqué précédemment, il a hérité d’un taux de chômage déjà très faible. Il ciblait particulièrement les emplois manufacturés, c’est-à-dire les salariés mis sur le carreau après la crise des subprimes. Pour cela, sa stratégie a été d’accuser la Chine de les avoir captés, sans pour autant réindustrialiser le pays comme il l’avait promis.

Contributrice du CEET : Thérèse Rebière

Source : TV5 Monde
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