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France: le confinement éloigne encore un peu plus les chômeurs de longue durée du retour à l’emploi

29 mars 2021

Les chômeurs de longue durée représentent près de la moitié des 6 millions de demandeurs d’emploi enregistrés en France. La succession de confinements amenuise davantage leur espoir de retrouver du travail.

L’association Solidarités Nouvelles Face au Chômage le remarque : depuis mars 2020, le désespoir s’installe chez les demandeurs d’emploi qu’elle accompagne. « Nous avons créé un numéro vert en mai dernier pour suppléer à Pôle emploi, qui était débordé, raconte Didier Lebret, bénévole chez SNC et coordinateur de la plateforme téléphonique créée par l’association. Depuis, nous avons dû enregistrer environ 1 000 appels, dont un tiers se sont transformés en accompagnement. »

Ce qui ressort des conversations se résume souvent à un sentiment de résignation. « Les chômeurs de longue durée pensent qu’ils sont encore plus mal placés qu’avant la crise sur le marché de l’emploi, résume Didier Lebret, qui redoute que certains renoncent complètement à chercher du travail et à être accompagnés. Ils se disent que ceux qui viennent tout juste de perdre leur emploi vont être avantagés face à eux, que les employeurs vont leur préférer les demandeurs d’emploi les plus ‘récents’. »

Un cercle vicieux

C’est en effet l’une des caractéristiques du chômage de longue durée : plus la durée de recherche d’emploi s’allonge, plus les chances de retrouver un poste s’amenuisent, créant une sorte de cercle vicieux. Maggie en a bien conscience. Depuis la perte de son poste il y a dix ans, et malgré la quinzaine de candidatures qu’elle continue d’envoyer chaque mois à des entreprises soigneusement sélectionnées, cette ancienne directrice d’association n’a toujours pas retrouvé d’emploi.

« Après mon licenciement, j’ai été aidante pour des proches malades, et je suis heureuse de l’avoir fait, explique-t-elle. Mais le problème, c’est que lorsque vous n’avez pas travaillé pendant plusieurs années, les recruteurs considèrent que vous n’êtes plus compétent, comme si vous n’aviez rien fait pendant toute cette période. Comme je ne travaille plus, on considère que je ne suis plus bonne pour le marché de l’emploi, cela se mord la queue. »

Une situation complexe, que le Covid-19 vient encore aggraver, observe Claire Vivès, sociologue au Centre d’études de l’emploi et du travail. « La pandémie va avoir des effets multiples, analyse-t-elle. L’un d’eux sera l’augmentation du chômage, et comme on sait que les chômeurs de longue durée mettent plus de temps à retrouver un emploi que les chômeurs inscrits plus récemment, leur temps de chômage va encore s'allonger, même en cas de reprise. »

La moitié des chômeurs en France le sont depuis un an et plus 

D’autant que le Covid-19 accélère la mutation du marché du travail, qui isole parfois encore davantage les chômeurs de longue durée. La généralisation du télétravail joue, par exemple, en la défaveur de Maggie. « Comme j’ai 58 ans et que j’ai quitté le monde du travail il y a dix ans, déplore-t-elle, on suppose que je ne peux faire de télétravail, que je ne maîtrise pas les outils. Mais je peux apprendre et évoluer, je passe mon temps à me former ! »

Un constat que confirme Claire Vivès. « On a tendance à se représenter la recherche d’emploi comme une file d’attente, chacun attendant son tour, présente-t-elle. Mais cela ne fonctionne pas cette façon-là pour tout le monde. » Parmi les personnes au chômage en France, dans les catégories A, B et C, près de 50,4% le sont depuis un an ou plus, d’après les derniers chiffres publiés par la Dares. Le phénomène, massif, se renforce régulièrement depuis son apparition à la fin des années 1970. Mais il ne touche pas tout le monde de la même façon.

Les plus susceptibles de voir leur recherche d’emploi s’éterniser sont en effet les personnes les plus fragiles : peu ou pas diplômées, à la recherche d’un emploi d’ouvrier ou d’employé, dans des territoires proposant peu d’offres d’emploi (zones urbaines sensibles ou rurales), âgées de 50 ans et plus et ayant des problèmes de santé ou de handicap, selon un rapport du Comité économique et social de juin 2020. Mais derrière les statistiques, toutes les catégories sociales sont concernées parmi les 4 000 personnes accompagnées chaque année par SNC, tous les profils et toutes les situations apparaissent.

Des difficultés qui s'amoncèlent

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Maggie, par exemple, dispose de plusieurs diplômes, dont un niveau bac +5. Mais cette qualification freine encore son embauche, car elle appelle des niveaux de rémunération qui rebutent les entreprises. Pour cette femme de 58 ans, les difficultés s’amoncèlent donc, malgré son optimisme et sa détermination. « Cela ne me dérangerait pas de quitter l’est de la France pour une région plus dynamique, affirme-t-elle. Mais mon déplacement est freiné par un problème de logement : il m’est impossible de me loger dans une ville avec les 500 euros d’aide par mois que me verse Pôle emploi. Même si je trouvais un emploi, je ne pourrais pas payer le loyer le premier mois, avant de toucher mon premier salaire. »

Sa recherche d’emploi est également perturbée par un réseau internet et téléphonique instable, et par l’absence de transports publics à proximité de sa maison : la gare ferroviaire a fermé. Cela limite ses déplacements, et donc les relations sociales et professionnelles qu’elle pourrait nouer.

L’accompagnement du binôme de bénévoles de l’association SNC l’aide néanmoins à maintenir un cap, grâce aux procédés d’écoute active auxquels ils ont été formés. Car d’après Didier Lebret, dès que le chômage s’éternise on est chômeur de longue durée au bout d’un an de recherche d’emploi, au sens du Bureau international du Travail  l’isolement et la perte de confiance en soi s’installent, au point de provoquer souvent des problèmes de santé.

Contributeur.trice.s du CEET : Claire Vivès

Source : rfi

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