La Croix

Endométriose, la double peine de la maladie chronique au travail

23 novembre 2020

Une femme sur dix en âge de procréer serait atteinte d’endométriose. Une maladie encore peu reconnue, tant sur le plan médical que professionnel.

Il est difficile de concilier maladie chronique et vie professionnelle. Il l’est d’autant plus lorsque la maladie est mal connue, sous-diagnostiquée et touche à l’intime. « Chaque cas d’endométriose est unique, pose Yasmine Candeau, présidente d’EndoFrance, association de lutte contre cette maladie. Certaines femmes vont demander une adaptation de poste à leur employeur ou via la médecine du travail, d’autres craignent la perte de revenus ou des conséquences négatives sur leur carrière ».

Sept ans en moyenne pour un diagnostic

Les symptômes de la maladie sont complexes. Il s’agit parfois de douleurs pendant les règles, ou permanentes, situées selon les cas au niveau de l’utérus, du diaphragme, des intestins, dans le coccyx, voire dans le thorax. Le tout doublé de troubles urinaires et digestifs.

Il faut en moyenne sept ans pour que la maladie soit repérée. « Avant le diagnostic, ma gynéco me disait que c’était dans ma tête. Alors je ne voulais pas montrer mes faiblesses au boulot », raconte Manuella, 37 ans. Formatrice dans un centre d’esthétique, elle souffrait de douleurs 15 jours par mois. « Je manquais de m’évanouir, c’était comme des coups de poignard dans le ventre, raconte-t-elle. Mais je serrais les dents toute la journée : j’aimais tellement mon travail et, en tant que prof, je devais montrer l’exemple. »

Le stress aggrave les symptômes

D’après une étude menée par la docteure en sciences politiques, Alice Romerio, pour le compte du Centre d’études pour l’emploi (CNAM-CEET), 82 % des répondantes auraient des réticences à demander des arrêts à leur médecin pendant les crises. Parmi les causes : la crainte de perdre des revenus ou d’essuyer des reproches de la part de la direction ou des collègues ou encore de ne pas voir son contrat renouvelé.

Fanny, qui travaille dans une association d’aide juridique a été souvent absente à cause de ses examens et opérations. Elle n’a jamais caché sa maladie : « Ma direction a été très compréhensive. En revanche, mes collègues - qui étaient des amis - m’ont complètement tourné le dos, me faisaient culpabiliser, m’accusaient d’exagérer ». Aujourd’hui stabilisée, elle travaille - presque - normalement : « Le stress aggrave souvent les symptômes. Ce serait tellement plus simple si les entreprises et salariés étaient sensibilisés et qu’un climat bienveillant s’installait dans l’entreprise ».

Écouter son corps

Pour 49 % des femmes interrogées par Alice Romerio, l’endométriose les a gênées dans leur carrière professionnelle. Un quart d’entre elles ont changé d’emploi ou de statut après la maladie. Une fois diagnostiquée, Manuella s’est vue proposer un aménagement de poste. Elle l’a refusé : « Physiquement, je ne pouvais plus, j’avais besoin de me reconstruire ».

Aujourd’hui, elle est sophrologue indépendante. Cela la passionne et lui permet d’organiser comme elle le souhaite son emploi du temps. « J’ai dû faire le deuil de ma carrière dans l’esthétique et adapter mon travail à la maladie », dit-elle, en concluant : « Et ce n’est pas plus mal d’écouter son corps ! ».

Contributrice du CEET : Alice Romerio

Source : La Croix
En savoir plusLire l'article dans son intégralité