Ingrid2 est un projet de recherche européen financé par la Commission européenne dans le cadre du programme de recherche Horizon 2020 (H2020). Ingrid2 succède, ça paraît évident, à Ingrid qui lui, fut signé lors du 7ème PCRD, comprendre "Programme cadre pour la recherche et le développement". Ingrid s'est appuyé sur le projet MEADOW datant du 6ème PCRD. Le but n'est pas là de vous noyer sous d'obscures acronymes mais de mettre l'accent sur le fait que ce projet de recherche qui détient déjà un long passé est, en plus, résolument tourné vers l'avenir. Car si nos chercheur.euse.s viennent tout juste de signer l'accord validant Ingrid2, elles.ils réfléchissent d’ores et déjà à la suite...
Qui est donc Ingrid?
Le projet Ingrid (Inclusive Growth Research Infrastructure Diffusion) rassemble en tout 17 instituts de recherche européens (dont notre Centre d’études de l’emploi et du travail (CEET)), est coordonné par l'Université catholique de Louvain et représente au total plus de 9 millions d'euros. En une phrase, le but était de créer une communauté de recherche composée de multiples infrastructures de recherche interagissant ensemble. Cette mise en réseau des moyens est d'habitude plutôt réservée aux sciences dures et sciences de l'ingénieur.e partageant ainsi, par exemple, des équipements coûteux. Dans notre cas où il s'agit de sciences humaines et sociales; le but est de partager des bases de données et des savoirs. Concrètement : créer un réseau d'infrastructures de recherche (IR) au sein desquelles les chercheur.euse.s peuvent, en fonction de leurs besoins scientifiques, aller çà ou là chercher l'information, travailler en collaboration avec des chercheur.euse.s d'autres instituts/pays, partager leurs savoirs, apporter des regards neufs sur des problématiques proches des leurs ou encore, former de façon plus globale leurs jeunes collaborateur.rice.s. Cette initiative qui vise à aborder les enjeux de la croissance inclusive s'inscrit de façon très concrète dans le développement de l'espace européen de la recherche qui est l'un des principaux objectifs du programme H2020.
En effet, le programme H2020 se décompose en trois "piliers" : l'excellence scientifique, la primauté industrielle et les défis sociétaux. Le projet Ingrid2 est lié au pilier "excellence scientifique", tout comme les actions Marie Sklodowska-Curie et les financements de l'ERC tel celui obtenu en 2015 par Matthieu Montes, chercheur en bio-informatique au laboratoire GBA.
Les recherches menées dans le cadre d'Ingrid2 ont pour thématiques les conditions de travail et la vulnérabilité. Ces thèmes et champs disciplinaires sont en adéquation parfaite avec les travaux menés par des chercheur.euse.s du Cnam au CEET et dans les laboratoires Lirsa, Lise et CRTD.
Plus précisément...
Les objectifs généraux d'Ingrid sont d’intégrer et de faire évoluer les infrastructures de recherche en sciences sociales existant en Europe sur les thèmes «pauvreté et conditions de vie» et «conditions de travail et vulnérabilité», à travers trois activités principales:
- l’organisation d'un accès transnational aux infrastructures de données statistiques disponibles nationalement
- l'organisation d’activité d’échanges mutuels de savoirs
- l'organisation d'activités de recherche conjointes pour améliorer les méthodes et les outils de recherche comparative
La réponse à Ingrid2 permet au CEET de se positionner égalemment comme un centre d’expertise européen sur les enquêtes françaises et internationales abordant les enjeux de la qualité de vie au travail et de la qualité des emplois. Une des activités du projet, intitulée « accès transnational » aux données (TNA), consiste en effet à conseiller des chercheur.euse.s étranger.ère.s sur les possibilités de comparaison entre les enquêtes françaises du domaine travail et emploi (enquêtes emploi, conditions de travail, Sumer, SIP, enquêtes couplées Reponse, COI, CT, RPS, Difes, Defis) et des enquêtes homologues développées dans d’autres pays d’Europe. Il s’agit également d’accompagner les chercheur.eur.s dans leur usage des enquêtes auprès des ménages et des entreprises développées par la fondation de Dublin (EWCS, ECS), l’OCDE (PIAAC, TALIS), EU-OSHA (Esener), le Cedefop (European skills and job survey) et de développer des coopérations de recherche autour de la mobilisation de ces données. À l’inverse, cela ouvre la possibilité aux chercheur.euse.s français.e.s d’être accueilli.e.s dans une des structures partenaires de l’accès transnational (TNA).
Le projet continue à financer des activités d’échanges mutuels de savoirs au moyen d'une école d'été (2018) et d'un atelier d’expert.e.s (2019). Par rapport à Ingrid, de nouvelles activités de réseaux sont programmées afin de favoriser l’innovation dans le développement des enquêtes et bases de données que le projet cherche à intégrer : forums sur les données (2020), échanges au sein du conseil d’orientation du projet.
Enfin, un ensemble de travaux de recherche sont lancés, impliquant les équipes associées aux piliers « conditions de travail et vulnérabilité » et « méthodologie statistique », qui contribuent au développement de l’infrastructure de recherche commune. Ils concernent la collecte et la mise à disposition des données, leur analyse et leur valorisation auprès des pouvoirs publics et des acteur.rice.s sociaux.ales. Les chercheur.euse.s du CEET associé.e.s au projet sont impliqué.e.s dans des travaux collaboratifs de codage de corpus de textes producteurs de normes sociales sur les enjeux liés au travail (accords collectifs, lois), avec l’objectif de réaliser des comparaisons entre plusieurs pays. Elles.ils travailleront à la constitution de métadonnées indiquant la marche à suivre pour comparer des enquêtes nationales réalisées dans plusieurs pays et portant sur les thèmes des conditions de travail, des relations de travail d’emploi ou des compétences mobilisées dans le travail. Elles.ils participeront à la construction d’une base de données intégrée de type pseudo-panel agrégeant plusieurs enquêtes internationales à un niveau intermédiaire. Ces outils seront ensuite mobilisés pour analyser les effets des comportements des employeurs et évaluer les politiques publiques du travail et de l’emploi ciblant les groupes les plus vulnérables.
Si Nathalie Greenan en est la responsable scientifique, le projet Ingrid2 est porté au CEET, tant sur le plan de la coordination globale, de la logistique et de l’organisation que sur celui de la recherche, par une équipe déjà forte de l’expérience acquise au cours du premier projet Ingrid : Sylvie Hamon-Cholet, Majda Seghir et Colette Leverne.
Depuis mai dernier et la signature du contrat, le Cnam, par le biais du CEET, est donc officiellement lancé dans ce projet d'envergure. 357 000€ seront versés sur 4 ans par la Commision européenne pour remplir ces objectifs en collaboration avec les 16 autres instituts de recherche européens partenaires de ce projet !
Qu'est ce qu'une infrastructure de recherche (IR) ?
Les I.R. sont des installations, des ressources et des services qui sont utilisés par les chercheur.euse.s pour mener leurs travaux et favoriser l'innovation dans leurs propres domaines scientifiques.
Le cas échéant, elles peuvent être utilisés pour l'éducation ou l’appui à d’autres politiques publiques comme la santé, la sécurité, la préservation de l’environnement, la présence française à l’étranger.
Elles comprennent :
- les équipements – ou ensembles d’instruments – scientifiques remarquables
- les ressources cognitives comme les collections, les archives et les bibliothèques scientifiques
- les infrastructures virtuelles, telles que les bases de données, les systèmes informatiques et les réseaux de communication
- ainsi que toute autre infrastructure ou réseau d’observation d'une nature unique indispensable pour permettre à leurs scientifiques utilisateurs de mener leurs travaux de recherche et d'innovation dans un cadre idéal d’excellence.
Les IR sont des outils indispensables à la recherche. Grâce à leurs performances exceptionnelles et à leur ouverture vers de plus en plus de communautés scientifiques, elles ont contribué à fédérer ces dernières et leur ont permis de réaliser de remarquables avancées dans plusieurs domaines de la physique, de la biologie et des matériaux. L’explosion de l’usage des grands réseaux de communication a boosté une virtualisation phénoménale des activités de recherche et d’innovation.